tristes tropiques

Publié le 28 Janvier 2009


Bonjour à tous

"Je hais les voyages et les explorateurs". Ainsi commence "Tristes tropiques" de Claude Lévi-Strauss, publié en 1955 et considéré comme son oeuvre la plus personnelle et la plus célèbre. Ecrit dans une langue extraordinaire et parfois "datée", ce classique de l'ethnographie ressemble autant à un carnet de voyages qu'à un cahier de réflexions, mêlant souvenirs personnels et introspection scientifique, références mythologiques et considérations religieuses, étude de la nature humaine et philosophie structuraliste.

A travers la vie des indiens d'Amazonie, l'ethnologue-anthropologue cherche à comprendre l'Homme et sa place dans la Société, notre civilisation humaine dans son ensemble, la vie, la mort, l'amour, la sexualité, la religion, la société, la communication, l'enseignement, la culture...

Avec ce titre antinomique (les tropiques sont censés être ensoleillés et paradisiaques et pas tristes et sales), cet ouvrage de Claude Lévi-Strauss est au final d'une profonde mélancolie : triste, désabusé, vieilli, presque misanthrope, l'auteur finit par comparer ses voyages à "une exploration des déserts de [sa] mémoire" (P.452) et reconnait les méfaits de la société "occidentale", colonialiste et impérialiste. Selon lui, malgré une curiosité humaine naturelle et légitime, l'exploitation économique et touristique et les voyages de masse permis par la technologie sont devenus un fléau social et écologique pour le reste du Monde. Ce que l'auteur a confirmé 50 ans plus tard, en 2005, en déclarant : "Ce que je constate, ce sont les ravages actuels ; c'est la disparition effrayante des espèces vivantes, qu'elles soient végétales ou animales ; et le fait que du fait même de sa densité actuelle, l'espèce humaine vit sous une sorte de régime d'empoisonnement interne —si je puis dire- et je pense au présent et au monde dans lequel je suis en train de finir mon existence. Ce n'est pas un monde que j'aime".

Quant à moi, en toute humilité, j'ai retrouvé en filigrane et en plusieurs endroits de "Tristes tropiques" des souvenirs personnels de voyages (Mexique, Népal...) qui m'ont fait comprendre pourquoi m'avaient quitté ce besoin d'ailleurs, cette curiosité des autres, cette envie de changement d'air... Le touriste n'a qu'une envie, celle de repartir au soleil. Le voyageur, lui, finit par réaliser la futilité et l'inutilité de ses grands déplacements. Partout, les mêmes familles, les mêmes histoires, les mêmes sourires, les mêmes tempêtes, les mêmes parfums... La curiosité et l'innocence font place à la lassitude, à la routine et au désamour... On vieillit... Claude Lévi-Strauss ne déclarait-il pas en substance devant la caméra de Jean-Claude Bringuier en 1974 que "l'homme ignorant a la faculté de rêver" ?

"Je vieillis, rien ne m'en avertit sinon cette usure aux angles, jadis vifs, de mes projets et de mes entreprises. Je suis encore capable de les répéter, mais il ne dépend plus de moi que leur accomplissement m'apporte la satisfaction qu'ils m'avaient si souvent et si fidèlement procurée" (p.407)

http://tontondaniel.over-blog.com/article-19799891.html

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Tonton Daniel

 

Rédigé par tonton daniel

Publié dans #littérature

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