Publié le 29 Novembre 2023
Dans le cadre de l'émission "L'histoire au scalpel" diffusée jeudi sur France 5, le médecin légiste et anthropologue Philippe Charlier présentait l'étrange histoire des coeurs des rois Louis XIII et Louis XIV. Conservés dans des reliquaires en vermeil placés dans la chapelle des Princes de la basilique royale de Saint-Denis, les organes supposés des deux souverains ont été soumis à différentes analyses chimiques et techniques afin d'authentifier leur origine, paléopalynologie (étude des pollens anciens), radiographie (micro CT scanner), datation au carbone 14 ou protéomique (identification des protéines grâce à un spectromètre de masse). Les résultats obtenus concordent tous avec le profil des deux hommes mais, faute d'ADN exploitable, l'authentification ne peut être que partielle.
Mais au-delà de l'aspect médical et historique, les coeurs embaumés des rois dissimuleraient un autre mystère, celui des tableaux peints avec des pigments d'origine humaine ! Dès le XVIe siècle, la vente de momies de développe en Angleterre et atteint des records au XVIIIe grâce au courant romantique qui envahit alors l'Europe entière. Un temps broyés à fins médicinales pour d'imbéciles et prétendues vertus d'éternité, ces "objets de curiosité" macabres et exotiques ont très vite envahi le monde de l'art pour les mêmes raisons. Dénommé Mumiae, mummie, "terre de momie" ou encore "brun égyptien", le "brun de momie", pigment obtenu par broyage de momies égyptiennes, est utilisé par quelques peintres à l'imagination la plus saugrenue afin de rehausser leurs oeuvres d'un brun-rouge très particulier utilisé pour les glacis ou les ombres posées sur les visages et surtout afin de leur assurer une part d'immortalité.
Le commerce lucratif de momies antiques, humaines ou animales, vendues entières ou en morceaux, explique le nombre important de contrefaçons réalisées alors à partir d'un mélange de bitume, d'asphalte et de poix, substances proches des résines employées dans l'antiquité pour les embaumements. Lors de certaines pénuries, guérisseurs et charlatans ont recours aux corps de condamnés ou aux cadavres retrouvés dans les tourbières d'Europe du Nord mais quand le trafic reprend, il devient si important que de nombreuses momies importées du Moyen-Orient servent alors d'engrais au Royaume-Uni !
Inspirés par cette pratique séculaire, deux artistes français auraient, selon la légende, utilisé des fragments des coeurs des rois Louis XIII et Louis XIV pour incorporer une part d'éternité très symbolique dans leurs tableaux. Mythe ou réalité ? Après la profanation des corps à l'abbaye du Val de Grâce et le vol des coeurs, ceux-ci auraient été vendus à deux "petits maîtres", le portraitiste Martin Drölling et le paysagiste Alexandre Pau de Saint-Martin, le premier ayant également acheté plusieurs coeurs de la maison de France dont ceux d'Anne d’Autriche et de Marie-Thérèse d’Espagne. Peint en 1815, "Intérieur d’une cuisine" de Martin Drolling est exposé au Louvre qui refuse toute dégradation provoquée de l'oeuvre. C'est donc au musée Tavet-Delacour de Pontoise que Philippe Charlier va prélever d'infimes échantillons de peinture brune sur "Paysage au moulin, dit vue de Caen" peint vers 1810 par Alexandre Pau de Saint-Martin. Malgré le scepticisme général, le microscope électronique à balayage va y révéler sans aucun doute possible la présence de cellules et fibres musculaires cardiaques ! Impossible d'aller plus loin dans l'analyse et d'établir un lien direct entre le tableau et les reliques mais le résultat semble plutôt donner corps à la légende !
Les coeurs des rois Louis XIII et Louis XIV furent très rapidement restitués à leur descendant Louis XVIII lors de la Seconde Restauration. Quant au brun de momie, il est toujours vendu aujourd'hui dans le commerce. Un pigment minéral beaucoup moins envoûtant que son prédécesseur, ne contenant que carbonate de calcium, oxydes de fer et kaolin !
Tonton Daniel
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