Publié le 15 Juillet 2012
Bonjour à tous
Ouvert au public depuis 2008 sur le site des anciennes pompes funèbres municipales, le 104, situé dans le 19e arrondissement de Paris, se définit comme "espace de programmation et de création,
d’expériences et d’innovations, perméable aux vibrations du monde contemporain, (...) ouvert aux foisonnantes pratiques artistiques et culturelles d’aujourd’hui, ainsi qu’aux expressions
spontanées".
Présentée ainsi et malgré ses artistes résidents, la finalité du lieu parait plus intellectuelle qu'artistique ! A mille années-lumière de l'esprit bohême du Bateau-lavoir à Montmartre au 19e
siècle, cet espace "relationnel" regroupant bouquiniste, restaurant, cafétéria, librairie et marché bio, fonctionnant grâce à des mécènes et des partenaires comme Darty, Orange, Air France, la
RATP ou Télérama et nécessitant 12 millions d'euros pour son fonctionnement annuel, est devenu malgré lui la matérialisation de l'éternel débat entre pragmatisme et idéologie : la création
artistique contemporaine peut-elle se passer de mécènes et d'acheteurs ?
L'exposition au 104 du célèbre lustre de Joana Vasconcelos "A Noiva" (La Fiancée) répond peut-être à ce paradoxe économico-culturel. Entièrement composé de tampons hygiéniques, ce lustre "XVIIIe siècle" a été jugé trop subversif et refusé dans l'exposition des oeuvres de l'artiste présentée en ce moment au château de Versailles. Il se murmurait le 26 juin dernier sur le plateau d'Elisabeth Quin dans son magazine "28 minutes" sur Arte ("Art contemporain et patrimoine : mariage d'intérêt ou artistique ?") que le lustre monumental n'était pas à Versailles pour des raisons techniques : trop lourd et trop encombrant, il aurait endommagé les plafonds du palais. Où est la vérité ? Problèmes matériels ? Souci esthétique ? Crainte de perdre une manne touristique indispensable comme le suggérait le critique Philippe Dagen le 21 juin dernier : "Joana Vasconcelos, une femme un peu trop libre pour la cour du Roi-Soleil" ?
Le Roi-Soleil peut-être, mais pas le Régent ni Louis XV qui auraient certainement adoré ce lustre coquin ! Autrefois, mécènes royaux et privés auraient sans doute cautionné, acheté, voire même commandé un tel objet mais, de nos jours, des intérêts financiers considérables obligent les artistes à quelques arrangements afin d'éviter toute schizophrènie. A priori, et malgré des dépenses de fonctionnement dignes d'un musée classique, pas encore de compromis artistique au 104 où l'on peut aussi admirer des jeunes danseurs à l'entrainement et visiter des expositions en accès libre. Mais pour combien de temps ?
Merci à Patrick et à Sylvie pour m'avoir fait découvrir ce lieu original.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Cent_Quatre_(%C3%A9tablissement_culturel)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bateau-Lavoir
Tonton Daniel